Productions végétales
Oenologie Les années se suivent
mais les millésimes ne se ressemblent pas...
Faisons un point sur l'état des vignes en Sud-Ouest/Nouvelle-Aquitaine : D'après la note de saison N°3 du SRDV “Sociéte de recherche et de développement viticole”
Le stade Taille de pois
Le stade Taille de pois est un stade à « mi-parcours ». C’est le dernier stade où la lecture concernant les éléments des organes jeunes est intéressante (azote, phosphore). C’est aussi le début de la caractérisation de l’équilibre potasso-magnésien.
Contexte climatique
Le millésime 2021 a connu un début de cycle dans l’ensemble pluvieux et frais. Le cumul pluviométrique depuis le 1er mars enregistré à la station de St Julien de Beychevelle est de 411mm (396 en 2020), dont 355mm tombés entre le 1er mai et le 22 juillet (170 en 2020). Quant aux sommes de températures, on accuse un retard de presque 120 degrés jours sur cette station par rapport à l’année dernière. Cela représente autour de 8-10 jours de retard à ce jour. Les 10 jours d’augmentation des températures relevées entre fin mai et début juin ont heureusement permis une reprise de la croissance végétative avant le début de l’été, jusque-là au ralenti. Cela n’a toutefois pas relancé suffisamment l'activité de minéralisation, notamment sur les sols au réchauffement plus long. Du fait des fortes quantités d’eau entre mi juin et fin juillet, les sols ont du mal à ressuyer sur les parcelles les moins drainantes et des signes d’asphyxie racinaire sont visibles (notamment sur les sols argilo-calcaires). La pression fongique est parfois très forte (Mildiou sur feuille et grappe, Black rot par endroit), encore aujourd’hui alors que le début de la véraison s’annonce.
Eléments minéraux majeurs
Les assimilations en azote sont les plus faibles au stade Taille de pois depuis le début des mesures en Nouvelle-Aqui-taine/Sud-Ouest (2015). Le mauvais ressuyage des sols et le maintien des températures basses n’a pas permis la remobilisation de l’azote par la vigne. S’il est intéressant de ne pas avoir des niveaux d’azote trop importants afin de favoriser la synthèse des polyphénols, il ne faut pas non plus qu’ils soient trop bas au risque de pénaliser le développement des fruits et la capacité de fermentation des moûts (faibles azotes assimilables). Des apports sont encore pertinents à ce stade compte tenu des valeurs faibles, en particulier sur les parcelles montrant à ce stade des difficultés de pousse. Les assimilations en potassium et magnésium sont aussi parmi les plus basses depuis 2015. Si une assimilation modérée en potassium est recherchée sur les cépages précoces pour ne pas aboutir à des vins aux pH trop élevés ou pouvant parfois manquer de fraîcheur, ces bas niveaux risquent d’engendrer des difficultés de maturation sur les cépages plus tardifs. Le potassium étant un élément très mobile dans la plante, des apports foliaires sont possibles jusqu’à 10-15 jours avant la récolte. Les bas niveaux de magnésium, quant à eux, peuvent limiter la photosynthèse ainsi que la synthèse des polyphénols (tanins, anthocyanes) en fin de cycle. L'épisode de gel du printemps dernier a créé un décalage de développement au sein des parcelles. Les maturités lors des prochaines vendanges seront donc également hétérogènes. C'est pourquoi, il est plus que jamais nécessaire de préparer en amont la logistique de vendange et les orientations produits de chaque parcelle. Pour obtenir une vision d'ensemble du vignoble et orienter ses choix stratégiques, la cartographie NDVI (carte de vigueur) est un appui pertinent qui permet de :
• Caractériser les différences de vigueur intra/inter parcellaires suite au gel,
• Prévoir l'orientation des parcelles selon les zones et l'impact du gel (rosé, rouge...),
• Apporter une correction tardive pour homogénéiser la maturité.
• Organiser un échantillonnage pour des contrôles de maturité différenciés. Les paramètres comme l'azote assimilable, le degré potentiel et le potassium sont particulièrement pertinents à contrôler cette année.
Article écrit par S. Brun, responsable Laboratoire
Ambroisie à feuille d’armoise : intervenir dès l’interculture
Les ambroisies ont levé avant la récolte à l’intérieur des parcelles. La moisson va induire un développement rapide de l’ambroisie, dû à la suppression de la concurrence de la culture et à un meilleur accès la lumière. Les ambroisies fauchées par la barre de coupe vont redonner de nouveaux rameaux : l’ambroisie va continuer son développement et produire du pollen et des graines ! Les ambroisies représentent un véritable enjeu de santé publique : le pollen abondant qu’elles émettent à la fin de l’été provoque des réactions allergiques chez 6 à 20% des français (données ARS). L’ambroisie à feuille d’armoise, une des 3 ambroisies, colonise de plus en plus le Tarn et Garonne. Un arrêté préfectoral, au titre de la santé publique, rend la lutte contre les ambroisies obligatoire avant floraison (vers mi-août).
L’interculture d’été, une période propice
L’interculture d’été est une période très propice au développement de cette adventice. Après la récolte de la céréale à paille, du colza ou du pois protéagineux, l’ambroisie a le champ libre pour se développer. Il n’y a plus de concurrence et elle peut croître, aidée par sa bonne résistance à la sécheresse. Sa croissance est d’autant plus importante et rapide que des pluies surviennent au cours de l’été, associées à des températures chaudes. Heureusement, l’interculture est également une période idéale pour combattre l’ambroisie en complétant la lutte en culture, qui peut s'avérer parfois insuffisante ; l’objectif primordial étant d’empêcher la pollinisation et la grenaison.
Evaluer le risque sur les parcelles
Les niveaux d’infestations peuvent être très différents d’une parcelle à l’autre. Avant la récolte, les plantes restées jusqu’alors sous le couvert de la culture sont en état de vie ralentie. Avec le passage de la moissonneuse-batteuse, les plantes les plus grandes vont être coupées mais toutes, grandes et petites, vont aussitôt bénéficier d’une mise à la lumière, en l’absence de toute concurrence. Celles qui sont coupées vont produire de nouvelles tiges et toutes vont croître rapidement. La présence d’ambroisie à la récolte peut avoir plusieurs origines : • Levée en culture d’hiver dès mars-avril, en absence de contrôle par désherbage, elle reste à l’état latent sous la végétation. • Un faible peuplement épi, lié à des difficultés d’implantation - zones de mouillères, zones compactées ou un printemps sec - laisse de l’espace à l’ambroisie et permettent sa levée et sa croissance. • Les passages de roues pour la pulvérisation et l’épandage d’engrais sont fréquemment infestés par les ambroisies, de même que les bordures de champ. A contrario, un désherbage en culture réussi et une culture dense et homogène conduisent à de faibles risques de présence d’ambroisie. Si la culture est déjà colonisée par l’ambroisie, une intervention est urgente car la pollinisation aura lieu quelques semaines après la récolte. Il est prudent de ne pas se fier aux dates calendaires repérées par habitude, la pollinisation pourrait intervenir dès la fin juillet. En cas de non colonisation par l’ambroisie, l’agriculteur dispose de plus de latitude pour gérer l’interculture.
article écrit par I. Barrier Chambre d'agriculture 82
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Gel en production de noisettes : où en est-on ?
Lors de la visite de la préfète sur l’exploitation de Thierry Gouze au Mas-Grenier le 16 avril dernier, vous aviez fait part de la difficulté à évaluer les conséquences du gel sur la production de noisettes faute de recul, et évoqué des pertes allant de 30% à 70% en fonction des situations. Qu’en est-il maintenant, à la mi-juillet ?
Maintenant, on y voit un peu plus clair et il n’y a pas beaucoup de noisettes ! Sur les variétés très précoces, il reste 10% de la récolte et il en reste 30% sur les précoces. Pour les variétés de cœur de récolte, on a 50% de la récolte et pour les tardives, on est à 65%.
Vous parlez d’une chute physiologique habituelle autour du 14 juillet. Expliquez-nous ?
La pollinisation a lieu de Noël à fin février et la fécondation en juin. La chute physiologique, on y est en plein, les fruits non fécondés tombent. Et ça tombe beaucoup ! On soupçonne le gel d’avoir malmené nos noisettes. Est-ce que cette période de chute est terminée ? Non, ce n’est pas fini. Nous avons un retard de 8 jours sur la date de maturité, lié à la pluie et aux températures fraîches de ces derniers temps. Le phénomène va encore se poursuivre quelques jours.
Lorsque vous évoquez l’impact du gel, vous employez le verbe “soupçonner”. Pourquoi cette précaution ?
Comme je l’ai déjà dit, nous n’avons pas de recul. La dernière expérience du gel remonte à 1991. Et il y a 30 ans, les surfaces en noisetiers étaient peu importantes et surtout les variétés n’étaient pas les mêmes qu’aujourd’hui : c’étaient des variétés à coque, on n’avait pas de variétés d’industrie. Toutefois, les conditions des 15 premiers jours de juin étaient favorables à la fécondation, donc on soupçonne le gel. Quant à la qualité, on ne sait pas ce qu’il en sera. Là encore, on manque de recul.
Comment la coopérative UNICOQUE envisage les choses ?
La coopérative travaille sur deux scénarios. Un premier, optimiste, avec une récolte à 7 000 tonnes, c’est à dire identique à celle de la campagne précédente en tenant compte de l’augmentation des surfaces de 500 ha/an et un deuxième, beaucoup plus alarmant, à 5 000 tonnes avec très peu de noisettes d’industrie et de variétés précoces. Dans ce cas, on ne pourra pas alimenter nos clients qui risquent de se détourner de nous. Il faut savoir que la récolte est excellente en Turquie, que l’Italie et l’Espagne n’ont pas gelé : au niveau mondial on nous annonce 1,1 millions de tonnes.
En interne à la coopérative, des mesures de soutien aux adhérents ont-elles été décidées ?
Nous avons mis en place un report d’annuités concernant les prêts plantation et les prêts mécanisation. Nous avons aussi différé l’appel de capital social. Nous proposons aussi des avances de trésorerie de 30% de la valeur récolte et un déblocage de la caisse de péréquation à hauteur de 500 000 euros. Tout cela a été voté : notre volonté est qu’aucun adhérent d’UNICO-QUE ne reste sur le bord du chemin de la réussite. Nous sommes sur une culture pérenne qui a 30 à 40 ans de vie : il n’est pas question qu’un adhérent soit stoppé dans son parcours. La filière noisette compte aussi sur le soutien de l’Etat, qu’il s’agisse de la procédure calamités pour laquelle une deuxième mission d’enquête s’est rendue sur le terrain mardi dernier, du PGE, du dégrèvement d’impôts fonciers ou des mesures sociales mises en œuvre par la MSA.
Comment vont les producteurs ?
On sort de deux années où les rendements ont été très moyens, et avec le phénomène d’alternance, cette année on aurait du avoir une belle récolte, mais il y a eu le gel. Le contexte est morose. A la suite du gel, plusieurs réunions bout de verger ont été organisées en petit groupe et tous les producteurs ont été contactés par leur administrateur référent pour évaluer les situations individuelles. Il y a des situations qui nous inquiètent avec des problèmes de trésorerie, d’autant que les producteurs de noisettes sont généralement aussi producteurs de fruits et donc touchés par le gel. L’étape critique interviendra en fin d’année…
Propos recueillis par Dominique Forneris
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